MEMOIRE
[dédié à ma grand-mère
maternelle]

Mémoire, mémoire...
à ta mémoire,toi, celle aux
[traces
abolies,
toi, que tous les tiens ont
trahie
sans états d'âme, après
ta mort.

Toi qui, sitôt en terre, fut
reléguée dans l'enkystement,
le plomb
du non-dit familial,
second cercueil par ceux-même
qui te devaient pourtant leur
[vie,
leur chaleur, leur
[respiration !

Toi qui représentais ce qu'on
doit évacuer, cacher, honnir
pour cause de normal mépris
car tu n'étais
pas assez blanche !

Toi, que tous ont du oublier
pour se rapprocher,
[soi-disant
du sommet, du nec plus ultra
de la réalité humaine !

En effet, que ne ferait-on
pour être du côté béni
des maîtres, des purs,
[des vainqueurs ?

Mais aujourd'hui,
je crie...mémoire !

Mémoire...de la chaîne et du
joug, de mes ancêtres déchus,
de toutes les humiliations

A en sangloter,
en grincer !

25/02/2006.

2éme poème :
DANS L'ILE DU DOCTEUR
MOREAU
Dans l'île du Docteur Moreau,
les hommes-bêtes grondent de
[colère.

Parce qu'on les a obligés,
[contraints à être ce qu'ils
[ne sont pas.

Parce qu'on a fait d'eux des
être hybrides, honteux d'une
[part d'eux-mêmes,
des êtres perdus, qui ont
[perdu le sens de leur
[identité.

Dans l'île du Docteur Moreau,
[donc, la colère va gronder
transposition à peine
[maquillée de bien d'autres
[colères,
de bien d'autres
[exaspérations, bien réelles
[celles-là
et l'oeuvre n'a pas
[seulement traît à
[l'apprenti-sorcier !

Lisez le livre, ou regardez
[le film en filigrane, que
verrez-vous, sinon
[l'oppression que, sans
[conteste, fait peser
toute culture, dès lors
[qu'elle se ressent comme
SUPREME ?

03/08/2006.

3éme poème :
A L'HOMME MORT DE FROID APRES AVOIR ETE EXPÜLSE DE CHEZ LUI
[NOVEMBRE 2005]
Neige bleue
et soleil de sang
rasant, bas, rouge, au
[tranchant dur

Neige, tons bruns éparpillés
recroquevillés
et tremblants
des ultimes feuilles à rester
accrochées
à l'orée des bois.

Neige, campagne abandonnée,
forêts frèles et dégarnies,
squelettiques et
[transpercées
par la lumière et le froid
blancs.

Neige, grumeaux immaculés,
retroussés
au fil des chemins,
serpentements bleuis, marbrés
d'hématomes,
poudre transie
sur le point de durcir ou
[bien
de fondre-qui peut bien
[savoir ?

Neige bleue, qui a profil bas
et qui se borne à végéter
sans gloire au voisinage des
isolats bruns
sans mouvement.

Neige fripée
sur les talus
pilée par le silence
errant

tu attends le soleil coupant,
tu te recroquevilles sous
son mince fil ensanglanté.

Un homme est mort de bon
[matin
sous ton regard indifférent
et glacé, sur cette étendue
dépeuplée, rétractée,
tout seul.

Le froid lui a léché les
[dents
il n'avait plus pour tout
|toit que
celui de sa voiture et pour
tous bagages
que sa misère,
sa fierté absurde,
béante.

Patricia
Laranco.

biografia:

Née à Bamako, au Mali, en 1955, d'un père français et d'une mère originaire de l'Ile Maurice, Patricia Laranco a passé sa petite enfance en Afrique noire, le reste de son enfance puis son adolescence dans le Sud-Ouest de la France, où elle a poursuivi des études supérieures d'histoire et géographie. En 1979, elle vient s'installer à Paris, où elle rencontre le père de ses deux filles, un tamoul originaire de Sri-Lanka avec lequel elle vivra en couple durant treize ans. A Paris, elle exercera successivement les professions d'animatrice et d'employée de bibliothèque.
Elle a commencé à écrire de la poésie à l'âge de seize ans, et, à ce jour, a publié 6 recueils de poèmes. Parallèlement, nombre de ses textes poétiques ont paru dans diverses revues littéraires francophones [françaises, belge, luxembourgeoise, canadienne] ainsi que dans des anthologies et sur quelques sites internet. Outre la poésie, elle s'adonne aussi à la critique littéraire , à la photographie, au collage photographique et à la peinture [une trentaine d'expositions à ce jour, toutes en France].

arkangele@aol.com